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L’impossible protection de la saveur d’un produit alimentaire. Une chance pour les vins ?

Publié le : 04/12/2018 04 décembre déc. 12 2018

La CJUE (13 novembre 2018, aff.C-310/17) décide, à l’occasion d’un litige relatif à une création fromagère, que la saveur d’un produit alimentaire n’est pas une œuvre et ne peut donc bénéficier d’une protection au titre du droit d’auteur.


Un marchand de légumes et de produits frais néerlandais créé un fromage à base de crème fraîche et de fines herbes, dont il cède les droits à un industriel qui fait breveter la méthode de production.

Trois ans plus tard, un produit concurrent est mis en marché.

Le producteur estime qu’il s’agit d’une contrefaçon par copie de la saveur de l’invention dont il a acquis les droits.

Estimant que cette imitation porte atteinte à son droit d'auteur, il agit judiciairement.

Selon lui, le droit d'auteur sur une saveur renvoie à l’impression d'ensemble provoquée par la consommation d'un produit alimentaire sur les organes sensoriels du goût en ce compris la sensation en bouche perçue par le sens du toucher.

Ainsi le fromage est une création intellectuelle et doit bénéficier de la protection au titre du droit d'auteur en qualité d'œuvre.

Pour la juridiction nationale, la question était de savoir si l'instabilité potentielle ou éventuelle d'un produit alimentaire ou son caractère subjectif lors de la perception d'une saveur, s'oppose à ce que la saveur d'un produit alimentaire soit considérée comme une œuvre protégée au titre du droit d'auteur.

La Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt du 13 novembre 2018 saisie sur question préjudicielle va répondre en deux temps.

Elle examine d'abord la question au regard des dispositions de la directive communautaire 2001/ 29 applicable en l'espèce, relevant que certaines juridictions nationales ont dénié à une saveur la possibilité d'être protégé au titre des droits d'auteur.

Ainsi, notre Cour de cassation rejette la possibilité d'une protection d'une odeur au titre du droit d'auteur dans un Arrêt du 10 décembre 2013.

La Cour précise ensuite que l’instabilité potentielle d’un produit alimentaire et/ou le caractère subjectif de la perception d’une saveur ne pourrait être protégé par le droit d'auteur au titre de la Directive que si une telle saveur peut-être qualifié d'œuvre au sens de cette Directive.

On entend ainsi par œuvre un objet original, qui est l'expression d'une création intellectuelle de son auteur.

Et la protection au titre du droit d'auteur impose que l’objet soit identifiable avec suffisamment de précision et d'objectivité.

Les opérateurs économiques doivent pouvoir identifier avec clarté et précision des objets protégés au profit de tiers, notamment de concurrents.

A contrario, tout élément de subjectivité nuisible à la sécurité juridique doit être écarté dans le processus d’identification de l'objet protégé.

La Cour précise que l'identification de la saveur d'un produit alimentaire repose essentiellement sur des sensations et des expériences gustatives qui sont subjectives et variables puisqu’elles dépendent notamment de facteurs liés à la personne qui goûte le produit concerné, tels que son âge, ses préférences alimentaires et ses habitudes de consommation, ainsi que de l’environnement ou du contexte dans lequel ce produit est goûté.

Enfin, elle retient qu’une identification précise et objective de la saveur d'un produit alimentaire, qui permet de le distinguer de la saveur d'autres produits de même nature, n'est pas possible par des moyens techniques en l’état actuel du développement scientifique.

Cette conclusion est heureuse.

Transposée aux productions viticoles, appellations notamment,  il aurait été difficile de distinguer une saveur, qui par hypothèse doit se retrouver dans les vins du même type, issus d’un même terroir, et de concevoir que cette saveur puisse être susceptible d'appropriation par un professionnel au détriment des autres. 


Michel DESILETS 
Avocat

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